jeudi 4 novembre 2010

article décevant

l'article décevant auquel je fais référence est publiée dans le monde d'hier soir dans la rubrique "débat".

J'ai donc cherché sur le net à en savoir davantage sur son auteur pour comprendre les motifs d'une telle prise de position.

Une lecture de quelques sites permet d'identifier que l'auteur revendique une qualité de spécialiste des questions politiques et géopolitiques allant des quartiers-ghettos des périphéries urbaines aux conflits de mémoire, des enjeux autour de l'idée de nation aux débats à propos du modèle français et républicain d'intégration et de ses alternatives, anglo-saxonne et multiculturalismes en particulier, de la question postcoloniale aux problèmes de délinquance…
Il a participé à différentes enquêtes auprès d'associations militantes spécialisées sur les questions de banlieues, ghettos, identités et identité nationale (ACLEFEU (2006), Les indivisibles (2007/2008)…).
Il revendique une grande capacité de relation et d'ouverture de dialogue avec les habitants des quartiers défavorisés et une participation durant quatre ans (2001 — 2004) au bureau national de SOS Racisme.

Voilà qui éclaire ces quelques lignes dont je déduis que les policiers ont peur, que les délinquants n'ont plus peur, que les citoyens, quant à eux ont doublement peur, peur de la police et peur de son inefficacité.

Réduire l'insécurité à travers le seul sentiment de la peur me semble limitatif.

comme sont limitées les solutions proposées pour supprimer l'insécurité soit
- une politique sociale ambitieuse "seul moyen d'assécher le terreau de la délinquance".
- pour la police il faut la recentrer sur le judiciaire et créer un corps d'inspection autonome.

Je m'interroge sur la manière et les motifs de cette publication. Comment peut on diffuser un article aussi sommaire dans les colonnes du monde en maîtrisant si mal son sujet et en étant captif de poncifs si éculés.

L'action policière n'est qu'un des leviers permettant d'assurer le lien sociétal. Elle n'est ni exclusive, ni accessoire.
La PJ n'est dans cette action qu'un outil parmi d'autres. Elle ne traite qu'après coup certains préjudices.
Un corps d'inspection dimensionné est nécessaire à toute institution publique. Son efficacité est tributaire d'une volonté politique.

si certains éléments du constat de mr Robine sont pertinents, son analyse est partielle voire partiale. Le thème de l'insécurité et les exigences liées à une action républicaine de sécurité méritent mieux.



"Alors que chacun se prépare à la prochaine campagne présidentielle, il est temps de dresser le bilan de cette politique phare du président sortant. A dix-huit mois de la fin du mandat présidentiel, la peur a-t-elle changé de camp ? Sans doute. Mais plus précisément : qui a peur, aujourd'hui ?
Les policiers et les gendarmes ont-ils peur ? Oui, lorsqu'ils interviennent dans certains territoires devenus des ghettos, et craignent parpaings ou télévisions qui chutent des toits ou des étages sur leur passage. Oui, face à des délinquants dont la violence croît à la mesure de l'armement et des protections des policiers.
Oui, lorsqu'avec leur équipement antiémeute, ceux-ci utilisent contre des adolescents des armes aussi dangereuses que des Flash-Ball. Oui, enfin, comme en témoigne leur comportement de plus en plus brutal dans leurs interactions quotidiennes avec les citoyens.
Les délinquants ont-ils peur ? Non, malheureusement. Les trafiquants des cités ghettos ont bien compris que seule compte désormais la visibilité de l'action policière, et en aucun cas son efficacité. Des auteurs d'actes crapuleux sont parfois prêts à laisser leur victime inconsciente pour un sac à main, violence extrême produite par un environnement social et urbain très dégradé. Sans compter les escrocs en tout genre, les cambrioleurs, les trafiquants d'êtres humains, les proxénètes, les époux violents, les entreprises qui enfreignent les normes sanitaires, les corrupteurs... tous ceux qui savent que leurs crimes ou délits ne sont pas mis en exergue par le pouvoir et ne méritent pas que la police y consacre d'importants moyens.
Les citoyens ont-ils peur ? Oui. Peur de la police ou peur de son inefficacité, si ce n'est les deux. Des citoyens de plus en plus nombreux ont peur de la police, après avoir cru par exemple qu'un citoyen a encore le droit de protester s'il est indigné par le comportement d'un policier à son égard ou à l'égard d'un tiers ; combien ont relaté l'expérience de la garde à vue qui leur a servi de punition ? Combien de parents inquiets que leurs enfants, lycéens et manifestants, puissent être victimes de violences policières ?
D'autres, également de plus en plus nombreux, ont peur après avoir constaté que les policiers ne les protègent pas dans leur quartier, qu'ils sont impuissants à prévenir les actes violents ou délictueux comme à les sanctionner, qu'ils aggravent les tensions dans leur ville plus qu'ils ne les réduisent, qu'ils refusent d'enregistrer les plaintes, ou bien les reçoivent en faisant comprendre à quel point ça ne les intéresse pas et qu'ils n'ont pas la moindre intention d'enquêter.
Sans aucun doute, la politique d'emploi des forces de sécurité en France depuis près de dix ans est un échec total, ce que chacun, journaliste ou policier, commence à dire. Pourtant, ce qu'à coup sûr va nous proposer le président sortant pour 2012, ce sera plus de police, plus de répression, plus d'armes... L'escalade jusqu'où ?
Il est temps de tout changer en ce qui concerne les missions et les modalités d'intervention des forces de police et de gendarmerie. C'est à la gauche qu'incombe la responsabilité de produire à ce sujet un discours clair, réaliste et innovant. Prendre en considération les phénomènes de violence et de délinquance et leurs victimes, c'est bien ; cela ne justifie pas de sombrer moralement, en approuvant le sécuritarisme. La politique de Nicolas Sarkozy en la matière est non seulement brutale et dangereuse, elle est aussi inefficace.
Il faut donc rappeler que ceux qui composent les forces de police et de gendarmerie sont des citoyens, égaux à tous les autres. Si les premiers sont dotés de pouvoir de contrainte, et d'armes, c'est dans un unique but : protéger les seconds. Les forces de police et de gendarmerie doivent s'en souvenir ; c'est la responsabilité du pouvoir. La peur doit à nouveau changer de camp, car il est insupportable dans une société démocratique que la population ait peur des délinquants et de la police.
La meilleure politique de sécurité ne remplacera jamais une politique sociale ambitieuse, seule à même de favoriser l'inclusion de chaque citoyen et de redonner l'espoir aux enfants des classes populaires et des ghettos. On ne réduit la délinquance qu'en asséchant son terreau.
Une nouvelle politique de sécurité exige de nouvelles politiques judiciaires et pénitentiaires. Néanmoins, une mauvaise politique de sécurité contribue à détruire l'indispensable lien de confiance entre les citoyens et à l'égard de l'Etat, et ainsi à aggraver la délinquance comme la peur de l'autre. L'enjeu est d'importance, même si la politique de sécurité ne cause ni ne règle tous les problèmes.
Pour rétablir la confiance avec les citoyens, il est temps de distinguer les corps d'exécution et d'inspection dans la police. Pour que l'action policière redevienne efficace, il est urgent de nous doter d'une politique d'emploi des forces de police et de gendarmerie différente. Il faut privilégier la police judiciaire, une police d'enquête et d'investigation. Une police diffuse et immergée dans la population, qui n'a besoin ni de casques ni de Flash-Ball. Une police en laquelle tous les citoyens aient confiance, et donc apte à mener une prévention efficace."
Jérémy Robine, consultant-associé Entreprises et développement régional (EDR), docteur en géopolitique
Article paru dans l'édition du Monde du 04.11.10




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